La
France peine à rattraper son retard concernant le mauvais état de son sous-sol.
Condamnée plusieurs fois par la Cour européenne de Justice elle est en passe de
payer une forte amende. La France serait-elle dans ce domaine le plus mauvais
élève de l'Europe? Le chemin à parcourir serait-il si important ou le mot
pollution synonyme de lenteur? Comment éviter à l'avenir des problèmes comme
ceux constatés avec le pyralène sur le Rhône?
Comment expliquer que notre progression soit si lente ?
Cette lenteur
peut s’expliquer par le fait qu’au lieu de renforcer la politique de
dépollution - qui coûte de plus en plus cher au contribuable - on devrait
plutôt se préoccuper de limiter les sources même de cette pollution. D'autant
que certains composants chimiques polluant trop souvent notre sous-sol ont la
vie dure. Certains pays l’on compris et c’est tant
mieux pour eux. (Avez-vous deviné pourquoi les
salades, les radis et en général les légumes coûtent
environ 2 à 3 fois moins cher (voire 5 fois moins cher) en Allemagne qu’en
France ?)
Les
sociétés industrielles sont l'objet d'inspections régulières et ont obligation
de respecter les normes de rejet sinon l'usine est fermée. Sauf accident, elles
ne devraient pas être en cause. Il n'y a donc pas grand-chose à redire de ce côté
sinon que la police de l'eau peine à faire appliquer des sanctions et que les
passages en justice restent peu fréquents. Par contre, on laisse les
agriculteurs et surtout les éleveurs de bétail rejeter un peu n’importe quoi! Il
y a sûrement de nombreuses méthodes pour combattre le mal à la source. Ne
pourrait-on pas par exemple améliorer l’usage de béton et ciment
(véritablement) poreux dans les régions urbaines facilitant ainsi les
infiltrations vers notre sous-sol qui en a bien besoin. Cela présenterait en
plus l’avantage de réduire sensiblement les inondations. Trois mots
complémentaires viennent à l'esprit pour résoudre ces problèmes ; <
Formation, incitation, répression>
On s'accorde
donc à dire qu'une bonne partie de notre sous-sol est gravement polluée par les
méthodes utilisées pour la production agricole. L'accumulation d'algues nocives
et malodorantes sur les côtes bretonnes, le dépassement des taux de nitrates et
de pesticides ainsi que les contrôles sanitaires réglementaires1) le
prouvent. Viendrait-on enfin de s'apercevoir qu'il est préférable de s'attaquer
aux sources même de la pollution plutôt que de financer une dépollution de plus
en plus coûteuse? Toujours est-il que ces pratiques, bon gré mal gré, vont
bientôt (devoir) cesser. Ce qui est extrêmement grave en cas de pollution
locale d'une rivière ou de son sous-sol alluvionnaire est que tout ce qui se
trouve en aval du lieu de pollution sera victime à plus ou moins long terme de
cette pollution. Lors d'une pollution accidentelle, les poissons meurent par
millier sur les lieux de la pollution mais l'eau se régénérant assez rapidement
en raison de l'écoulement de la rivière, les poissons réapparaissent petit à
petit. Par contre, probablement en raison de stockages irresponsables dans le
sol, on se trouve maintenant devant une pollution du sous-sol alluvionnaire par
des polluants chimiques lourds à longue durée de vie qui se fixent dans les
nappes libres des alluvions et l'on peut légitimement se demander en combien de
temps la nature va reprendre ses droits. Compte tenu de leur grande durée de
vie, on peut aussi s'inquiéter que les déchets radioactifs provenant des
centrales nucléaires situées à proximité des rivières ne soient pas encore
enfouis à grandes profondeurs mais stockés provisoirement à proximité des
centrales.
Qu'en est-il
du sous-sol alluvionnaire de nos rivières ? Deux remarques à leur sujet:
D'une part,
on ne profite pas suffisamment de la présence
d'eau dans la nappe phréatique peu profonde. D'autre part l'eau qui circule
dans ces nappes aquifères est probablement déjà un peu filtrée et probablement
un peu moins polluée que ne l'est l'eau de la rivière. Ces nappes phréatiques
''libres'' et peu profondes s'écoulent comme la rivière par gravité vers la mer ou vers nos voisins belges ou
luxembourgeois en suivant sensiblement la même direction que celle-ci. La
vitesse d'écoulement est seulement beaucoup plus lente. Lorsque ces
zones alluvionnaires sont constituées de craies fissurées, les vitesses peuvent
être plus importantes, mais même dans ces cas favorables elles restent
naturellement beaucoup plus faibles comparativement à la rivière. Le sous-sol
des rivières est plus ou moins perméable. Il peut être très poreux, au point de
prélever une partie des eaux du fleuve comme par exemple sur la basse Loire en
aval de Gien lorsque le fleuve, en mal d'affluent, voit une partie même de ses
eaux s'infiltrer dans le sous-sol pour ne réapparaître beaucoup plus tard et un
peu en contrebas à la résurgence du Bouillon (Source du Loiret) avant de
continuer à s'écouler à nouveau plus rapidement vers l'océan. Plus rarement la
rivière coure sur des terrains imperméables. Dans ce cas la rivière est
généralement bien en eau même par temps sec et la pollution est drainée plus
rapidement vers l'aval.
Les quantités
d'eau ainsi drainées sont loin d'être négligeables. Pour s'en convaincre il
suffit d'examiner d'une part, la superficie de notre douce France de
Où il pleut-il le plus en France?
Un bref coup
d'œil sur la carte ci-dessous permet de comprendre qu'il pleut le plus sur les
zones montagneuses. Le ballon d’Alsace, le mont Aigoual ainsi que les Monts du
Cantal ont longtemps servi de référence pour localiser sur la carte les
endroits où il pleut le plus. Dans un récent article du Monde, il est fait état
des calculs effectués au MEDD* à partir de données communiquées par météo
France.
Ces travaux
sembleraient prouver que les régions de France les plus arrosées sont en train
de changer. En effet, les précipitations constatées à la fin de l’année 2005
dans les zones A et B ont été singulièrement élevées par rapport à la moyenne
mesurée pendant la même période pour les années allant de 1946 à 2004. Cette
différence, très importante pour la zone B (+150 à +800%) est un peu moindre
pour la zone A (+125 à 150%). En
contrepartie, mis à part la Côte d’Azur, les autres régions de France souffrent
d’un déficit de précipitations avec moins d’eau que d’habitude (-30 à -100% suivant les régions). Lors de l'été 2003, la sécheresse et la chaleur en France
ont été telles que la source de la Moselle s'est tarie fin août. Météo
France avait prévu une diminution des précipitations en 2006 alors que l’eau
potable est plus rare et coûte de plus en plus cher. Pour ces raisons les chiffres
donnés au MEDD sont inquiétants. Ils montrent en effet que les zones les moins
irriguées représentent plus de 90% de la surface de notre territoire alors que,
malheureusement pour notre pays, les eaux de la zone B, la plus irriguée, sont
drainées très rapidement vers la "Grande
Bleu" sans que le sous-sol ne bénéficie
pleinement de l’effet purificateur du cycle de l’eau et d’un drainage
suffisant. Il semble logique en effet, les vents dominants en France venant du
secteur Sud-ouest, que les Pyrénées ainsi que les monts Aigoual ou Lozère,
situés en amont, soient un peu plus irrigués que les autres. La production
d'électricité obtenue en traversant la ligne de
partage des eaux dans le sens Atlantique >Méditerranée aggrave encore
un peu cette situation 2). On
peut penser que la circulation de l’eau en sens inverse c’est-à-dire dans le
sens Méditerranée > Atlantique serait plus bénéfique
pour le sous-sol de notre territoire, mais est-ce à cause des singularités du
relief français, cette inversion ne se fait malheureusement pas, dommage.
D'autres transferts de rivière à rivière se font en restant sur le même grand
bassin versant 3).
Le
fond de carte, colorié selon la hauteur de précipitation annuelle donne une
idée de la façon dont les rivières drainent leurs eaux plus ou moins polluées
vers la mer.
L’auteur
s’en excuse, mais elle ne prend pas encore en compte les récentes constatations
de MEDD à partir des données communiquées par Météo France.
Toute
cette pluie alimente notre sous-sol et génère des aquifères continus peu
profonds ou profonds
suivant les régions
(zones hachurées) sur la majorité de la surface de la France
1) Chaque
particulier français reçoit un relevé annuel l'informant de
la qualité de l’eau qui lui est livré au robinet. Il peut, lorsque les limites
fixées par Bruxelles sont dépassées, agir auprès des services publics. Chaque
citoyen peut aussi se regrouper pour action auprès d'organismes spécialisés.
L'institut Pasteur a été saisi de ce dossier. Il est fort probable que
l’ingestion de pesticides lorsqu’elle dépasse les valeurs limites
réglementaires est nocive pour la santé. Le terrible accident de Bhopal aux
Indes dans une usine de fabrication de pesticides est là pour le rappeler. Un
contrôle sanitaire réglementaire de l’eau potable effectué par la DDASS** à partir de 9
échantillons prélevés sur le circuit de distribution et 3 échantillons en
production (après traitement) sur de l’eau souterraine provenant d’un puits en
nappe calcaire près de Champigny en Seine et Marne à
mis en évidence une teneur moyenne en nitrates et en pesticides pour 1 litre
d’eau distribué au robinet de respectivement 37,6 mg et 0,17 mg. C’est donc une quantité non négligeable de produits nocifs
provenant de notre agriculture qui s'infiltre dans notre sous-sol. (1mg=10-3
g, 1mg=10-6g,
une tonne=106g, 1 m3 correspond à 106g d’eau
douce. Lentement le temps fait son œuvre ; 3600 s/heure, 24heure/jour, 365
jours/an)
2) Les mauvais exemples :
- Les eaux du bassin versant de la Haute
Loire, heureusement de surface modeste, prélevées dans le lac naturel
d’Issarlès et envoyées sous
- La galerie souterraine sous les monts de Lespinouse à l'usine hydroélectrique de Montahut
rejetant les eaux de l’Agout dans le Jaur, affluent
RD de l’Orb. Ce transfert, mauvais pour notre sous-sol, fait par contre le
bonheur des canoéistes en mal d'eau sur l'Orb.
3) Quelques autres exemples utiles pour notre environnement :
- L’été,
lorsque les eaux de la Neste en crue sont prélevées
par un canal de dérivation long de 28km rusant avec
le relief pour transfuser un débit de près de
8m3/s vers les petites rivières du Lannemezan qui meurent de soif.
- L'utilisation
de béton véritablement poreux dans les zones urbaines pour faciliter
l'insertion dans le sous-sol des eaux de pluie
* Ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables (qui
s'appelle maintenant le MEDAD)
** Direction départementale des
affaires sanitaires et sociales de Seine-et-Marne