Le transport de l'énergie

Pour résoudre le problème planétaire de l'énergie et réussir la transition énergétique que la planète appelle de ses vœux il faudra qu’homo sapiens s'implique dans de multiples aspects.

Pour bien appréhender les problèmes à résoudre il lui faudra :

-    Considérer que nos réserves en énergie fossile s’épuisent progressivement et qu’il y a, quoiqu’en disent les climato-sceptiques, une relation étroite entre l'énergie et le climat.

-    Considérer que pour ces deux raisons, il lui faudra tenir compte des chaînes énergétiques qu’il utilise pour produire et consommer l'énergie de son choix.

-    Vu le caractère intermittent voire aléatoire des énergies renouvelables du type électrique considérer qu’il va devoir stocker l’énergie à proximité des lieux d'utilisation en évitant dans la mesure du possible de la transporter sur de trop grandes distances.

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Le transport des énergies électrique, hydraulique et thermique.

 

L'énergie, qu'elle soit électrique, hydraulique ou thermique n'échappe pas aux pertes de puissance en ligne.

Même les circuits très haute tension à 400 000 Volts assurant le transport de l'électricité des liaisons internationales ainsi que nationales entre les centres de production jusqu'aux réseaux de distribution n’échappent pas à ces pertes.

Pour une puissance transportée P watt = U volt  x  I ampère,  celles-ci sont égales à  W = R I ² t

 

Ceci dit les distances sur lesquelles l’énergie peut être transportée avec des pertes de puissance raisonnables se chiffrent en centaine de km avec l’électricité très haute tension alors que ces distances sont beaucoup plus faibles avec les énergies hydraulique débit-pression voire encore plus faible avec l’énergie thermique associé à la chaleur spécifique du fluide et les pertes thermiques en ligne.

  

Type d'énergie

1) Electrique

2) Hydraulique

3)  Thermique

Puissance P Watt

P=U I

P= Q p /360

P=Q T c

Unités

P en watt avec

Tension U en volts

Courant  I  en Ampère

P en kW =Q p /360 avec
- Q débit en  l/mn

p  pression en bar

P en kW avec

Débit Q en kg/s

Température T  (° Kelvin)

c chaleur spécifique du fluide

c = 4,18 kJ/kg et °C

Pertes de puissance

delta P = I (U1  - U2)

U=RI

delta P = Q ( p1 - p2 )

delta P = Q (Te - Ts) c

Remarque

Chute de tension en ligne

par effet joule U1  - U2

Pertes de charge

p1 - p2  en ligne

Chute de température

en ligne Te - Ts

 

1) En France c’est RTE qui s'occupe du transport de l'électricité depuis les centres de production jusqu'aux réseaux de distribution. Ceci sur les lignes à très haute tension. Cette société est aussi en charge de distribuer directement l'électricité sous haute tension aux gros industriels. Cela sous le contrôle de la Commission de Régulation de l'Energie (CRE). A noter qu’en matière d'énergie solaire voltaïque, l'Allemagne et l'Algérie ont signé en 2008 un projet de coopération novateur consistant à relier la ville algérienne d'Adrar et la ville allemande d'Aix la Chapelle par un câble électrique de 3000 km baptisé "clean power from desert"

 

Les liaisons électriques moyenne tension

 

 

 

En ce qui concerne la France, c’est la société Enedis (ex-ERDF), qui est en charge de la distribution à moyenne tension sur de plus petites distances pour les autres clients (petite et moyennes entreprises, collectivités…)

 

 

 

Transformateur Enedis en région parisienne de 200 000 > 20 000 volts (70 Mw)

 

Les liaisons hydrauliques

 

On peut transporter dans de bonnes conditions l'énergie hydraulique dans des canalisations.

L'eau a en effet une faible viscosité cinématique (1 centistoke) ce qui confère à l'écoulement dans la tuyauterie, des pertes de charges très raisonnables 1)  (le lecteur peut se reporter au site www.oces.fr qui lui permet d'effectuer la vérification des calculs en ligne). Cela est d’autant plus intéressant qu’en raison de sa chaleur spécifique élevée, l'eau est également un excellent véhicule thermique. La puissance thermique pouvant être délivrée par une conduite d'eau est importante et a pour valeur P = Q T c , T étant la température en degré Kelvin et le débit de fluide circulant dans cette tuyauterie (c étant la chaleur spécifique de l'eau).

Toutefois, les tuyauteries métalliques ne sont pas bien adaptées au transport de l'énergie thermique en raison des déperditions thermiques qui peuvent être redoutablement élevées si l'on néglige l'isolation de la tuyauterie 2).

 . 
 

1)A titre d'exemple une tuyauterie de diamètre intérieure D=5'' (125mm) est capable de véhiculer un débit d'eau de 1400 l/mn (23 kg/seconde)  sur 0,5 km avec une perte de charge limitée à environ 2 bar  (alors que l'on se trouve pourtant en régime turbulent) La puissance perdue en perte de charge (voisine de 4 kW) est donc très faible par rapport à la puissance thermique pouvant être véhiculée par la tuyauterie. Avec un tel débit et en prenant comme hypothèse Te = 70°C et Ts = 30°C on a Te – Ts = 40°C .

Soit P = Q (Te –Ts) c = 23 x 40 x 4,18 = 3850  kJ/s équivalent à  3850 kW. Cette même tuyauterie serait donc suffisante pour alimenter par de l'aquathermie profonde une vingtaine d'immeubles d'une centaine de petits appartements de deux pièces. La puissance à développer en raison de la hauteur de charge dans le cas de la géothermie profonde où l'eau chaude est prélevée à environ 1000 m de profondeur est moins importante qu'on pourrait le penser et égale à environ 8kW pour une courbe piézométrique à -20m.

 

2)Dans l'hypothèse où cette même tuyauterie de 5'' est en acier non isolée avec une température extérieure de 18 °C, les déperditions thermiques ne sont pas négligeables et ont effet pour valeur, sur la base d'une déperdition thermique de 15 watts/m² °C et une surface extérieure de la tuyauterie  S= πDL = π x 0,130 x 500 = 205 m². Soit une perte de puissance de P= 15 x (70 – 18) x 205 = 160 000 watts soit près de 160 kW ce qui impose de prévoir une isolation. (Voir aussi les pertes sur le réseau ECS d'un immeuble)

 

 

Ces pertes thermiques en ligne expliquent pourquoi les centrales thermiques du chauffage urbain actuel utilisant la combustion des ordures ne peuvent être trop éloignés des bâtiments à chauffer. Elles expliquent aussi pourquoi les centrales nucléaires calogènes se sont peu développées pour le chauffage urbain en raison de la proximité du réacteur par rapport aux habitations. Ces pertes thermiques en ligne semblent par contre très intéressantes dans le cas du chauffage thermodynamique géothermique et on a du mal à comprendre pourquoi les matériaux utilisés pour la circulation du fluide caloporteur dans les puits de forage sont encore en PEHD (polyéthylène haute densité) matériaux de synthèse ayant une faible conductibilité thermique  alors que des tuyauteries métalliques ayant une plus grande conductibilité semblent mieux adaptées pour transmettre les flux thermiques. Pour cela, des matériaux inoxydables comme le cuivre ou l’aluminium semblent mieux adaptés. Aves des surfaces d'échanges plus faibles les puits de forage seraient moins nombreux ce qui réduirait les frais d'installation.

 

 

Le transport des combustibles

 

Le pétrole

La consommation mondiale de pétrole est estimée à 30 milliards de barils par an, soit puisque 1 baril=159 litres et la densité du pétrole de 0,8 une masse de pétrole de quelque 3,8 1012 kg. Cette masse correspond à la capacité de quelques 15 000 supertankers d'une capacité moyenne actuelle de 250 000 tonnes. Les 8000 supertankers qui sillonnent les mers pour l’approvisionnement du monde en pétrole effectuent donc approximativement entre 4 et 5 allers retours par an. La consommation optimum d'un moteur thermique avoisinant 200 g/kWh, cette masse de pétrole représente une énergie considérable de 46,4 1012 kWh

 

Le gaz

S'il n'y avait les pollutions extrêmement graves en cas d'accident, un avantage du transport des combustibles par voie maritime et notamment du gaz semble tenir au fait qu'il s'effectue sans pertes d'énergie importantes. Les gazoducs qui assurent le transport du gaz sont souvent pour cette raison du domaine de la démesure. La longueur totale des gazoducs dans le monde est estimée à plus de 1 million de km soit 25 fois la circonférence terrestre. Leur vulnérabilité aux actes de sabotage dans les zones de conflits ainsi que les trop grandes distances entre les gisements et les zones de consommation ont conduit à développer un mode de transport sous forme liquide. C'est ainsi que le gaz naturel liquéfié (GNL) moins volumineux qu'à l'état gazeux est transporté à -160°C et à la pression atmosphérique par les navires méthaniers. Il est probable que les 55 milliards de m3 de gaz russe correspondant sensiblement à 600 TWh qui seront transportés par le gazoduc Nord Stream 2  vers l’Europe suite aux récents accords entre Paris et Berlin se fera sous forme gazeuse. Ceci vu la difficulté de maintenir -160°C dans ce gazoduc immergé au fond de la mer Baltique à 2000 m de profondeur. Une profondeur qui devrait mettre ce transfert d’énergie à l’abri des actes de sabotage

 

Les tuyauteries du gazoduc Nord Stream 2 sont soudés à Laage au nord de l’Allemagne avant d’être posés au fond de la mer Baltique
Ce gazoduc va modifier la façon dont l’Europe s’approvisionne en gaz

 (Voir page 550)

 

L’Uranium

Un autre « combustible » peu volumineux est lui aussi transporté : Il s’agit de l’uranium 

 

Vue aérienne du site d’Arlit au Niger où est extrait par AREVA depuis 1969 une bonne partie de l’uranium utilisé comme combustible dans nos centrales nucléaires.
Moins vulnérable aux actes de sabotage que les gazoducs ce site a néanmoins été victime d’un enlèvement de son ancien directeur par la branche algérienne d’Al-Qaïda

 

 

Accès au fichier du livre sur l’énergie