Tribune libre

Les Lutins thermiques ont récemment demandé à Balendard, citoyen lambda, ce qu’il pensait du PREH plaçant le préfet de département au sommet de la hiérarchie dans le cadre de la rénovation énergétique de l'habitat.

Voilà la nature de leur conversation :

Les Lutins thermiques

Vous qui cherchez à percer les raisons du blocage actuel vous devriez vous réjouir de voir que nos responsables politiques mettent le Préfet en demeure de faire quelque chose d’utile : mener à bien ces trois volets de la rénovation thermique de l'habitat à savoir : financer la rénovation, apporter des aides financières et mobiliser les professionnels.


Balendard

On ne peut pas dire que cela me réjouisse mais je me rends à l’évidence : l’état français met son préfet de département en demeure de faire quelque chose d'utile et je constate qu’une fois de plus, la fonction préfectorale est en perpétuelle évolution. S’il n’y parvient pas on ne pourra pas dire en tout cas qu’il n’a pas été aidé !! Nous espérons sans trop y croire que le pouvoir politique du Préfet conjugué à l'impulsion forte qu'on lui demande de fournir suffira à faire bouger les mentalités

Les Lutins thermiques

Je vous sens sceptique sur l'évolution favorable de ce qui vient d'être enclenché par nos dirigeants. Le préfet n’est-il pas en charge des intérêts nationaux et le symbole de la permanence et de la continuité de l'action publique ?

Balendard

Oui mais je suis sceptique. Je ne comprends pas bien comment le Préfet pourrait « accompagner » le particulier. Les outils habituels du Préfet sont le contrôle administratif et le respect des lois et je crains que dans le cas présent ce soient les outils appropriés. Il me semble que les véritables acteurs de la transition énergétique sont différents. L’enchevêtrement des compétences et une trop grande diversité au niveau de la formation* freine l’arrivée d‘une « autorité organisatrice » sans laquelle rien ne peut se faire de valable. Il faut se rendre à l'évidence, la décision d'enclencher la rénovation thermique d'un immeuble résulte de l'accumulation de prises de positions individuelles.  Chacun d’entre nous voit midi à sa porte mais quoiqu’il en soit le syndicat des copropriétaires qui vote OUI ou NON lors d'une AG organisée par un syndic fait partie de la chaîne de décision pour ce qui concerne le volet privatif. Concernant le volet collectif de la Solar Water Economy, le Maire, plus proche du citoyen me semble être un intermédiaire incontournable situé entre ce dernier et l’exécutif symbolisé par le préfet de département et les ministres d’état. Certains maires de l’hexagone français commencent à se manifester et à considérer que nous sommes en mesure d’inverser la courbe de destruction de nos écosystèmes. Ne craignez-vous pas que le préfet de département rajoute un échelon inutile à cet incroyable aggloméra fait d'organismes, de normes, de réglementations de campagnes d'informations départementales?


Les Lutins thermiques

Non pas nécessairement, mais une simplification des normes et des procédures associées à une réduction des coûts, d’où qu’elle vienne, pourraient leur permettre de retrouver cette position de tuteur qu'ils ont un peu perdu ?


Balendard

Peut-être, en tout cas je crois plutôt que ce qu’attend en définitive le "citoyen décisionnaire" ou pour reprendre les termes utilisés dans le langage anglo-saxon de « Citizen décision maker » qu’on lui propose deux choses qui lui permettraient de FAIRE :

-         un système de GÉNÉRATION thermique finalisé de qualité à coût restreint le rassurant sur le respect de notre environnement et lui donnant l'assurance de la performance.

-         des conseils simples et pratiques au niveau de l'ISOLATION lui donnant une vision claire et simple de ce qu’il convient de FAIRE afin d’obtenir une tenue sur le long terme et un retour sur investissement plus raisonnable pour ce deuxième poste en regard des économies d'énergie réalisées. En tout cas, si le blocage devait persister, il demande l'absence de sanctions tant que ces deux objectifs ne sont pas atteints et par-dessus tout un « système » qui permette d’éviter le chauffage d’appoint par radiateurs électriques lorsque le chauffage est collectif !

Nos revendications ne vous semblent-elles pas raisonnables ?
 

Les Lutins thermiques

L’attitude du "citoyen décisionnaire", se plaçant dans la position d’un Maître d’ouvrage responsable du retour de sa dépense me semble tout à fait raisonnable. D’autre part connaissant le caractère « Mouton de panurge du Français je n’ai aucun doute, après quelques opérations réussies ici où là, tout va s’enclencher naturellement. Le problème est toutefois de réussir les premières opérations et dans ce domaine les connaissances de l’architecte nous semblent mieux adaptées pour initier ces nouvelles réalisations que celles du Préfet avec son PREH. Particulièrement s'il a reçu une formation d'ingénieur orientée vers la thermodynamique et la mécanique des fluides en complément de celle décrite dans le Français et l’énergie

Balendard

Puissiez-vous être entendu. On sait ce qu’il faut faire pour préserver nos ressources naturelles mais force est de constater que notre politique énergétique n’est pas encore orientée dans les faits vers le « consommer moins » . Il y a bien déjà ici ou là des applications réussies dans l’individuel mais dès lors qu’il s’agit du collectif force est de constater que rien ne s’enclenche ou presque qui aille dans le sens de la généralisation. Il y a de toute évidence un déséquilibre flagrant et quelque chose qui cloche entre cette structure administrative pyramidale tentaculaire et l’embryon de structure que forment quelques citoyens motivés avec un syndic surchargé de travail et pour cette raison peu orienté vers l’innovation. En termes d’innovation, le Leader arriverait à convaincre en dehors de sa copropriété mais dès lors qu’il s’agit de passer à l’action dans la sienne c’est le blackout. Il faut espérer que les recommandations du Shift Project et ses 3 rapports :

- Comprendre

- Agir

- Organiser

qui engagent nos régions françaises à s'engager dans une réflexion nouvelle en choisissant des modes d'action qui conduisent à leur autonomie énergétique va être couronnée de succès. Pour faciliter l’action notre intérêt semble être de mieux associer les deux acteurs que forment le syndic et les agences immobilières. Il est probable à ce sujet que des syndics moins surchargés ayant un quota de clients moins important leur permettraient de mieux servir leurs clients en mettant en place une comptabilité analytique améliorant la compréhension de l'énergie consommée pour le chauffage des immeubles. Ceci vu que le service comptable du syndic a en sa possession tous les éléments lui permettant de le faire. Cette formation comptable associée à une rémunération un peu plus élevée permettrait au syndic de faire ce travail préparatoire. Bien que la somme des consommations individuelles ne soit autre que la consommation collective, cette formation devrait inclure une réflexion prenant en compte les notions de chauffage individuels (le plus souvent électrique) ou collectif (le plus souvent du type combustion par chaudière). Cette comptabilité analytique serait ensuite communiquée non seulement à l’agent immobilier mais aussi au maître d’œuvre en charge de la rénovation énergétique. Au premier vu qu’il a pour obligation en cas de location ou de vente d’un bien immobilier de diffuser cette « étiquette énergie » et ceci que le mode de chauffage des différents lots du bâtiment soit privatif ou collectif (Voir DPE1 page 213), le second étant donné qu’en cas de chauffage collectif, il doit nécessairement s’appuyer sur l’état antérieur souvent mentionné par l’Ademe afin de faire la comparaison avant-après en termes de consommation.

 

Le « mille-feuille » français et la rénovation énergétique de l’habitat

Dans le cadre de la « transition énergétique » ou plus restrictivement de la rénovation thermique de l'habitat faut-il " s'inquiéter du fait que dans une sorte de mobilisation générale, notre pays se soit pris au piège du tristement célèbre "mille-feuille français" et que peut-on en attendre ?


1) Le « mille feuille » français

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Pour être « plus près des citoyens », l’état français, liée aux autres pays européens par des accords internationaux est administrée à de nombreux niveaux

 

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Avec autant de maires que de communes c’était il y a peu de temps 36 646 maires maintenant réduit à 35 560 pour des raisons financières et quelques 526 000 conseillers municipaux si l’on ajoute au titre de l’intercommunalité quelques :

- 2223 communautés de communes avec leur Président et Vice-président
- 228 communautés d’agglomération ou urbaines et autant de Président et de Vice-président auquel s’ajoute quelques conseillers

Soit sensiblement 560 000 élus municipaux pour 120 habitants, la France, avec son « mille feuilles détient le record du Monde de l’assistance

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Pourtant, les élections passées, cela ne signifie pas nécessairement que le citoyen lambda est nécessairement mieux entendu

 

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Les citoyens en tant que contribuables se sentent écrasés par « le mille-feuille » Certains d’entre eux que l’on pourrait surnommer « les Leaders » pourraient chercher à se faire entendre grâce à ce « pouvoir latéral » proposé comme forme d’action par Jeremy Rifkin dans son livre sur la Troisième Révolution Industrielle. Pour faire avancer la rénovation thermique de l’habitat existant, ils pourraient tenter de se propager vers le haut tels des vers à l’intérieur du « mille-feuille » en tentant d’atteindre l’Europe au sommet de la hiérarchie verticale. Les Lutins thermiques observent que les résultats obtenus en France dans les cas d’une maison individuelle en  zone urbaine ou d’un  centre sportif collectif en zone rurale ou en Suisse, pays relativement indépendant par rapport à l’Europe sont incontestablement supérieurs aux nôtres. La « conférence internationale sur le climat » prévue fin 2015  en France va peut-être changer la donne. Toujours est-il que les Lutins thermiques s’inquiètent à juste titre du « Mille-feuille français »

2) Sa mobilisation pour assurer la rénovation énergétique de l’habitat

Un décret ministériel signé le 22 juillet 2013 par :

- Le Ministère de l’égalité des territoires et du logement, 
- Le Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, 
- La Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature, 
- La Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, 
- La Sous-direction de la qualité et du développement durable dans la construction, 
- Le Bureau des partenariats et des actions territoriales,

 place les préfets de département au cœur d'un dispositif de rénovation énergétique de l'habitat nommé PREH (plan de rénovation énergétique de l'habitat) et deviennent responsables pour leur département du bon déroulement des 3 volets du PREH. Trois volets qui sont résumés ci-après:

1 enclencher la décision de rénovation par l'accompagnement des particuliers
2 financer la rénovation en apportant des aides
3 mobiliser les professionnels afin de garantir la qualité de la rénovation

Administrateurs civils de l'état, les sous-préfets ensuite élevés lors de leur carrière au rang de préfet, sont issus de la prestigieuse école nationale d'administration (ENA). Ce ne sont évidemment pas des spécialistes de l'énergie, mais plutôt des "hommes de lettres" que des "hommes de science" et autant leur qualification que leur culture ne les prédisposent pas à assurer cette fonction et à jouer ce rôle. Conscient de cette lacune et soucieux de les mettre en situation de mener à bien leur mission l'état les a entourés et d'une multitude d'organismes de normes et de réglementation thermique comprenant: 

·      Certains Ministères et comité de pilotage : MEDDE  METL  DUHP DGEC

·      Des opérateurs : ADEME. ANAH. ANIL. DDT(M)  DREAL

·      Des associations : ARF. ADF. ADCF. AMF

·      Les formes d'action comme celle du Plan Bâtiment Durable de Philippe Pelletier

·      Des organismes de formation des professionnels du bâtiment FEEBAT (jugés insuffisants) ceci afin de respecter les notions d'éco conditionnalité dans le cadre d'un contrat de performance

·      La feuille de route "Built Up Skills" du projet européen

·      Les collectivités territoriales ARF, SRCAE, DPALPD  FSL  CLE

·      Les quelques 1000 ambassadeurs de l'efficacité énergétiques programmés

Ceci en y associant une multitude dispositifs supposés assurer l'aide au financement tels que : 

- CIDD et prêt PTZ (à taux zéro)  
- Tiers financement, 
- Enveloppe FEDER européenne  (dans  le cadre de cette aide européenne destinée à soutenir la "transition vers une économie à faible teneur en carbone" le premier ministre a donné autorité aux présidents des Conseils régionaux et aux préfets de région par circulaire du 19 avril 2013 leur implication dans un processus les autorisant à distribuer des aides FEDER pour la période 2014-2020
- Le fond chaleur renouvelable
- Les certificats d'économie d'énergie CEE
- La réglementation thermique RT2012

 

*C’est ainsi que le CSTB assure 3 formations différentes pour la conception de l’habitat neuf selon les exigences de la RT2012, les différents labels et la conception bio-climatique 

 

 

MEDDE
www.developpement-durable.gouv.fr/
Ministère de l'Ecologie, du Développement Durable et de l'Energie.

METL
www.territoires.gouv.fr/
Ministère de l'Egalité des territoires et du Logement

DUHP
http://www.developpement-durable.gouv.fr
Direction de l'Habitat, de l'Urbanisme et des Paysages.

DGEC
Direction générale de l'énergie de l'air et du climat

A noter que dans le texte d’une circulaire gouvernementale
il est fait mention des préfets de départements pour le PREH alors qu'il est question des préfets de région pour les enveloppes FEDER européenne