Bien que ce complément technique concerne principalement le chauffage urbain collectif, il a paru utile à l’auteur d’examiner le cas pratique de deux propriétaires de maisons individuelles.
Le premier cas
évoqué ci-après ayant posé
problème, l’autre accessible ici ayant fonctionné dès la mise en route selon les
promesses du constructeur. |
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Questions |
Réponses |
Cas de la maison individuelle avec PAC en relève de chaudière à gaz |
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D’une surface au sol de 106 m² cette maison individuelle construite sur vide sanitaire (donc sans cave ni sous-sol) est complétée d’un 1er étage mansardée offrant une surface habitable voisine de 200 m². Equipée d’une chaudière gaz avec radiateurs à circulation d’eau, son propriétaire décide d’installer en complément du chauffage gaz, une PAC air eau de fourniture allemande en relève de chaudière. Il considère sa maison bien isolée et en conséquence, il a décidé de ne pas améliorer préalablement l’isolation. Il a aussi précisé qu’il ne souhaitait modifier, ni son mode vie, ni son confort thermique, et qu’il envisageait de conserver sa production d’eau chaude sanitaire par ballon électrique. Son équipement électroménager comprend 2 machines à laver et deux fours. Déduction faite du crédit d’impôt de 5000 € cet investissement a représenté pour lui une dépense de 10 000 € mais il espère financer cette dépense par une réduction des frais d’exploitation de sa chaufferie qui représente pour lui une dépense annuelle en gaz de 1350 €. Après une année complète d’exploitation, il a constaté que cette modification a entraînée pour lui une petite économie sur sa facture annuelle de gaz voisine de 500 €, mais il a été déçu de remarquer que sa facture d’électricité a fait un bon vers l’avant de 500 € avec pour lui des frais d’exploitation globaux et un pouvoir d’achat inchangés. Que peut-on déduire de ces chiffres sachant que la PAC assure sa fonction correctement lorsque la température extérieure dépasse 5°C la chaudière étant alors arrêtée? |
Le résultat obtenu semble s’avérer décevant autant pour le gouvernement que pour l’utilisateur en termes de consommation en énergie primaire puisque celle-ci est apparemment inchangée. De plus, on peut estimer, la production d’énergie renouvelable (ENR) apparaissant nulle, que la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) est négligeable en regard de l’aide fiscale de 5000 € accordée. Le résultat obtenu semble donc aussi décevant pour l’utilisateur qui n’est décidément pas payé en retour. Alors qu’il a fait un geste citoyen : Le crédit d’impôt qu’il a reçu (5000 €), est loin d’avoir remboursé en totalité les frais d’implantation de la PAC de 15 000 €. Facteur aggravant, cette dépense a apparemment été effectuée en pure perte puisque le temps de retour économique est infini par le fait que les économies sur l’achat des combustibles primaires étant nulles, elles ne peuvent participer au remboursement des frais engagés pour l’achat de la PAC (10 000 €) Certes il ne s’agit pas ici d’une copropriété mais d’une maison individuelle, cependant l’idée évoquée par un responsable de l’association des responsables de copropriété (ARC) qu'il y aurait un maillon manquant dans les chaînes professionnelles existantes et qu'il pourrait être nécessaire « d'inventer » un nouveau métier afin de fusionner des connaissances qui seraient disparates n’est pas à prendre en considération. Le malheureux propriétaire pourrait être tenté de vouloir convaincre son fournisseur de ne pas le laisser tomber sur le plan commercial. Comment pourrait-il d’ailleurs engager une expertise judiciaire à l’encontre de celui-ci en remettant en cause le sérieux de la société qui lui a fourni la PAC ou les compétences du personnel qui a assuré son implantation et sa mise en route alors qu’elle fait parfaitement au dessus de 5°C extérieur. Le ferait-il, selon le Président de l’AFPAC, on en a pour environ deux à trois ans, personne ne touchant à l’installation en cas de litige pendant cette période . D’autant qu’il n’a pas été contracté un contrat d’assurance avant l’implantation de la PAC auprès d’un cabinet ce qui peut être préférable Encore faut-il, que l’expertise effectué par ce cabinet soit réalisé par un personnel compétent au fait de la complémentarité des techniques associées à la thermodynamique. afin de favoriser le dialogue avec le constructeur et l’installateur |
Pour une analyse plus fine, prendre connaissance des valeurs numériques ci-après
Les prix de l’énergie et les consommations
Les dépenses ainsi que les consommations les années ayant précédées et suivies la mise en place de la pompe à chaleur effectué en décembre 2008 dans la chaufferie s’établissent comme suit ;
Année 2007 |
|||
Energie primaire |
GAZ |
ELEC |
Total |
Consommations kWh |
28 320 |
2284 |
30 604 |
Dépense annuelle € |
1350 |
650 |
2000 |
Prix du kWh cts € / kWh |
4,76 |
28,4 |
|
On constate que :
- Sa facture de gaz initiale chauffage était de 1350 €/an pour un besoin thermique de
28 300 kWh (4,8 cts d’€/kWh)
- Le kWh électrique serait 6 fois plus cher que celui du gaz ! Il semble y avoir une erreur quelque part ou un problème d’abonnement et il est important de vérifier les factures d’électricité de l’année 2007.
Année 2009 |
|||
|
GAZ |
ELEC |
Total |
Consommations kWh |
20 560 |
10 700 |
31 260 |
Dépense annuelle € |
845 |
1 200 |
2045 |
Prix du kWh cts€ / kWh |
4,11 |
11,2 |
|
Le kWh gaz a sensiblement baissé
(de l’ordre de 15%) et le niveau de prix du kWh électrique a retrouvé un niveau
de prix de 11,2 cts€ / kWh plus conforme aux chiffres habituels. Pour expliquer
le prix au kWh de l’électricité en 2007 ce dernier serait-il à ce point
dépendant de la quantité commandée ?
A noter que les températures au rez de chaussée de la maison sont réglées à 21/22°C et qu’il faut l’appoint de la chaudière à gaz pour obtenir ces températures lorsque la température extérieure descend en dessous de 5°C.
Les dépenses annuelles
Montant des factures annuelles € |
|||
|
GAZ |
ELEC |
Total |
2007 |
1 350 |
650 |
2000 |
2009 |
845 |
1 200 |
2045 |
Elles sont en effet sensiblement inchangées pour le propriétaire
A noter que les factures de gaz et d’électricité sont peu claires et qu’il faut se prendre la tête pour lire les factures de ces organismes. Il s’agit de consommations allant du 1er février au 31janvier, dates des relevés à un ou deux jours près.
Les consommations thermiques
Les consommations globales d’énergie primaire 2007 et 2009 sont pratiquement inchangées (31 260 kWh au lieu de 30 604). On dire qu’à DJU constant entre 2007 et 2009, la différence entre les consommations électriques des années 2009 et 2007 à savoir
10 700 – 2 284 = 8 416 kWh correspond à l’énergie électrique Wm consommée par la PAC pendant l’année 2009
Le chiffre de 2 284 kWh qui ne devrait pas subir de variation notable correspond à l’énergie électrique consommée annuellement pour l’électroménager et la fourniture de l’eau chaude sanitaire (ballon électrique)
Le chiffre de 28 320 kWh correspond à l’énergie thermique Wc consommée annuellement pour le chauffage. Cette énergie étant délivrée uniquement par le GAZ en 2007 et à la fois par le GAZ et la PAC en 2009 avec une prépondérance au gaz un peu inquiétante.
La différence entre les consommations de GAZ des années 2009 et 2007 à savoir
28 320 – 20 560 = 7 760 kWh correspond à l’énergie thermique Wc délivré par la PAC pendant l’année 2009 qui semble bien faible.
On a donc suivant le principe de conservation de l'énergie (voir livre page 49)
Wm = 8416 kWh et Wc = Wm + Wf = 7 760 kWh
Wf = 7 760 – 8416 = - 656 kWh et un COP Wc/Wm < 1 !
Le COP de la pompe à chaleur est déplorable, le système global PAC + GAZ est en effet moins bon qu’un chauffage à effet joule avec convecteur électrique ayant un COP de 1.
Il n’y a donc en conséquence aucune production d’ENR.
Les dates des relevés de consommations
A nouveau et comme cela s’est produit avec les relevé GDF dans la cas des copropriétés les relevés de facture EDF et GDF se font sensiblement par années calendaire (du 1er février au 31 janvier) les périodes de chauffe étant à cheval sur deux relevés ce qui complique inutilement la tâche du Maître d’œuvre et l’impossibilité pour celui-ci de tenir compte de la rigueur de l’hiver (DJU) en cas de modernisation de la chaufferie.
A défaut d’obtenir enfin d’organisme comme EDF et GDF une consommation de juin à juin, une correction des calculs ci-dessus à partir de la comparaison du DJU des années 2007 et 2009 n’est envisageable que si le maître d’œuvre a connaissance des consommations mensuelles pendant et en dehors de la période de chauffe.
Les coefficients de déperdition de l’habitation
Avec une surface habitable de 2x106 m² = 212 m² et une consommation d’énergie annuelle pour le chauffage de 28 320 kWh on arrive à un coefficient moyen de déperdition annuel de 133 kWh/m² habitable honorable correspondant à la réglementation thermique gaz RT 2005.
Les puissances instantanées et les DJU
(La commutation GAZ vers PAC est indiquée en gris)
T ext °C |
NB jours |
Nb jours cumulés |
DJU21 |
image P |
kWh |
P kW |
GAZ/PAC |
-7 |
1 |
1 |
28 |
28 |
252 |
10,5 |
Par le gaz 13 489 kWh |
-6 |
1 |
2 |
27 |
27 |
243 |
10,1 |
|
-5 |
2 |
4 |
52 |
26 |
468 |
9,8 |
|
-4 |
3 |
7 |
75 |
25 |
675 |
9,4 |
|
-3 |
4 |
11 |
96 |
24 |
864 |
9,0 |
|
-2 |
4 |
15 |
92 |
23 |
828 |
8,6 |
|
-1 |
6 |
21 |
132 |
22 |
1 188 |
8,3 |
|
0 |
6 |
27 |
126 |
21 |
1 134 |
7,9 |
|
1 |
8 |
35 |
160 |
20 |
1 440 |
7,5 |
|
2 |
8 |
43 |
152 |
19 |
1 368 |
7,1 |
|
3 |
10 |
53 |
180 |
18 |
1 620 |
6,8 |
|
4 |
11 |
64 |
187 |
17 |
1 683 |
6,4 |
|
5 |
12 |
76 |
192 |
16 |
1 728 |
6 |
|
6 |
14 |
90 |
210 |
15 |
1 890 |
5,6 |
Par la PAC 14 759 kWh
Dont 5000 kWh provenant de l’EDF avec un COP moyen de 3 |
7 |
15 |
105 |
210 |
14 |
1 890 |
5,3 |
|
8 |
17 |
122 |
221 |
13 |
1 989 |
4,9 |
|
9 |
17 |
139 |
204 |
12 |
1 836 |
4,5 |
|
10 |
19 |
158 |
209 |
11 |
1 881 |
4,1 |
|
11 |
18 |
176 |
180 |
10 |
1 620 |
3,8 |
|
12 |
16 |
192 |
144 |
9 |
1 296 |
3,4 |
|
13 |
12 |
204 |
96 |
8 |
864 |
3,0 |
|
14 |
9 |
213 |
63 |
7 |
567 |
2,6 |
|
15 |
7 |
220 |
42 |
6 |
378 |
2,3 |
|
16 |
5 |
225 |
25 |
5 |
225 |
1,9 |
|
17 |
4 |
229 |
16 |
4 |
144 |
1,5 |
|
18 |
4 |
233 |
12 |
3 |
108 |
1,1 |
|
19 |
3 |
236 |
6 |
2 |
54 |
0,8 |
|
20 |
2 |
238 |
2 |
1 |
18 |
0,4 |
|
21 |
1 |
Durée chauffe 239 jours |
0 |
0 |
- |
- |
48/52 |
DJU 2665 28400
kWh /an
Puissance moyenne 5 kW
On peut estimer que le COP devrait encore être de 2 lors de la commutation à 5°C de température extérieure (ligne en gris) avec une PAC air eau ayant des performances moyennes
Important
Avec une PAC en relève de
chaudière, le fonctionnement est du type bivalent alternatif *
(La puissance délivrée par la chaudière à gaz n’est pas cumulative avec celle
délivrée par la PAC)
* Voir le livre de Mr Lemale
« La géothermie » expert dans ces domaines,
Le débit d’air dans l’évaporateur
L’évaporateur a pour fonction de prélever l’énergie dans l’environnement (ENR), l’air extérieur dans le cas présent. Il est constitué par un radiateur à ailettes avec ventilateur situé à l’extérieur de l’habitation. Pour que la PAC fonctionne correctement, il est nécessaire que les échanges thermiques se fassent correctement avec l’air ambiant. L’air froid évacué en sortie d’évaporateur ne doit évidemment pas être recyclé à l’entrée de celui-ci et être évacué librement dans l’environnement. Pour obtenir ce résultat le débit d’air circulant dans le radiateur à ailettes n’est pas négligeable. Pour que la PAC délivre une puissance thermique environ 6 kW avec 6°C extérieur (ligne grisée du tableau) avec un COP modeste de 2, il est nécessaire que 3 kW soit prélevé dans l’environnement (ENR), les 3 kW complémentaires provenant de l’énergie mécanique d’entrainement du compresseur (ELEC) étant récupérés sous forme thermique selon la loi de conservation de l’énergie.
Supposons, pour éviter tout risque de givrage, que l’air ressorte à 0°C à la sortie du radiateur à ailette de l'évaporateur*. Le calcul du débit d'air pour que l'évaporateur de la PAC aérothermique récupère 3 kW dans l'environnement est le suivant :
En une heure, c'est une énergie de 3 kWh ou 10 800 kJ qu'il faut récupérer, soit, compte tenue de la chaleur spécifique de l'air voisin de 1 kJ/kg et °C et à partir de la formule 1) :
Wf = m c Δθ 1) avec :
Wf Energie transmise en kJ
m Masse du produit en kg
c Chaleur spécifique du produit en joule/kg et °C
Δθ Elévation ou diminution de la température du produit en °C,
Une masse d'air utile m = Wf /ce(θ1- θ2)= 10 800 /6 = 1 800 kg/h
Compte tenu de la densité de l'air voisine de 1,3 kg/m3 à la pression atmosphérique, le débit d'air correspondant est de 1380 m3/h
En supposant que la zone grisée reste du domaine du gaz, c’est environ 15 000 kWh thermique qui devraient être fourni par la PAC en supposant que celle-ci ait un COP moyen de 3, le solde 13 500 kWh étant fourni par le gaz (Voir tableau ci-dessus).
La puissance thermique maximum délivrée par la PAC étant de 5,6 kW maximum, cela correspondant, pour un COP modeste de 2 dans les conditions les plus défavorables (ligne grisée du tableau page 3) une puissance compresseur voisine de 3 kW.
Dans ces conditions de rendement modeste la répartition entre les énergies primaires et ENR de cette chaufferie devraient donc être au moins de :
Pour les énergies primaires : Gaz 13 489 kWh (48%), Electricité 5000 kWh (17%)
Pour les ENR 10 000 kWh ( 35%)
Chiffre entraînant une économie voisine de 20% compte tenu du coût des combustibles primaires.
*Nota
Si la température de sortie de l'évaporateur est inférieure à 0°C, il peut y avoir formation de givre sur les ailettes du radiateur constituant l'évaporateur
Conclusion
Il ressort de cette étude peut-être difficile à comprendre pour le lecteur, que notre ministre de l'environnement a raison de s'inquiéter.
GDF et EDF sont avant tout des vendeurs de gaz et d’électricité*. Ils ont, en temps que tel, le devoir de facturer ce qui est réellement consommé, pas plus.
Quant à
l’Association Française des Pompes à Chaleur (AFPAC), s’agissant d’une PAC de
fourniture allemande, son Président va probablement expliquer qu’il lui est
difficile d’intervenir.
Au mieux va-t-il faire valoir son article paru sur la
revue chaud froid performances No 734, en justifiant les déboires de ce
copropriétaire par le fait que cette PAC a été acheté au plus mauvais moment:
celui du dangereux boom PAC qui a suivit le 2ème choc pétrolier de
mars 2008 et l’envolée du prix des combustibles fossiles avec un pétrole à 150
dollar le baril.
Il ne s'agit
donc probablement pas ici d'un mauvais étalonnage du compteur gaz mais d'une
surfacturation de GDF, que l’on peut espérer temporaire.
La consommation réelle
serait nettement plus faible que l’estimation prévisionnelle.
Les responsables du Grenelle ont donc raison d'être préoccupés et le journal le Monde a raison d'en parler.
La PAC effectuant correctement son travail au dessus de 5°C, il est moins important d’évoquer ici les raisons qui sont parfois énumérées en cas de mauvais fonctionnement d'une PAC en relève, à savoir:
· Problème de dégivrage avec cycles de dégivrages trop fréquents voire inutiles ?
· Renouvellement de l’air insuffisant à l’évaporateur,
· Température de départ radiateur trop élevée lorsque la chaudière à gaz commute vers la PAC du fait de radiateurs trop petits ou insuffisamment aérés
· Sous-dimensionnement de la liaison électrique entre le compteur EDF et le compresseur de la PAC entraînant des pertes en ligne inacceptables ?
A l'examen, toutes ces causes sont caduques, y compris la dernière puisque la consommation électrique reste raisonnable et que la pompe à chaleur assure correctement son travail lorsque la température extérieure est supérieure à 5°C, la chaudière à gaz étant à l’arrêt. Il reste donc à espérer pour ce malheureux propriétaire qu’un miracle va arriver.
Et bien le miracle tant attendu vient d'arriver : Notre ministre de l'environnement s'inquiète. Il a commissionné un Médiateur* pour prendre en charge nos problèmes. Au lieu d'une baisse de consommation gaz de 27% c'est une diminution proche de 50% voire un peu plus qui va être appliquée à notre heureux propriétaire,
On voit qu’il devient urgent que l’état et l’enseignement supérieur accepte de financer et d’organiser une filière de formation des professionnels en utilisant, pourquoi pas, la réduction du crédit d’impôt subit dans le cas de l’aérothermie de 50 à 40 puis à 25% du montant de la PAC (hors main d’œuvre).
Quant à la formation du grand public ou au moins son information, il serait temps qu’un organisme comme l’AFPAC se charge de ce travail et prouve qu’il est vraiment le seul organisme habilité à en parler en termes simples et compréhensibles.